Abstracts > Le care : narration et représentationsAtelier n°5 - Le care : narration et représentations Discutante : Anne Gonon | Doshisha University Atelier en français - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - L'essor de l'éthique du care face à la vieillesse à travers la littérature taiwanaise : l'exemple de « Libération » de Hwang Chun-ming A Taïwan comme en Chine et dans le reste de l’Asie orientale, le respect confucéen pour le grand âge a évolué sous l’effet des mutations socio-économiques enclenchées depuis les années 1980. L’essor industriel et commercial taïwanais dans les années 1980 a eu un fort impact sur la structure familiale rurale traditionnelle. C’est précisément sur le sort des personnes âgées dans les campagnes que se penche Hwang Chun-ming, écrivain réaliste né en 1935, dans son recueil de nouvelles Libération (放生), publié à l’orée du XXIe siècle (1999). L’œuvre de fiction est apte à sensibiliser son lectorat et à susciter une attention à l’autre et une empathie à travers le récit de vie : à ce titre, elle intègre l’éthique du care pour constituer ce que Maïté Snauwaert et Dominique Hétu (2018) appellent une « poétique du care ». Les nouvelles du recueil de Hwang Chun-ming ont toutes pour thème des personnes âgées. Ce dernier indique dans la préface que, compte tenu des changements intervenus dans la société et la structure familiale taïwanaises, les familles à trois générations sous un même toit n’existent plus, et que l’on n’ose plus attendre de ses enfants qu’ils prennent soin de soi dans ses vieux jours. « Notre pays et notre société devraient tirer une leçon des sacrifices consentis par la génération précédente et mettre en place en temps voulu des politiques et une aide sociale en faveur des personnes âgées. » déclare-t-il sans ambages, inscrivant clairement son œuvre dans la perspective de l’éthique du care. Cette étude de cas, qui sera conduite selon une double perspective d’étude littéraire et de sociologie, pourra servir de prémisse à d’autres analyses portant sur des œuvres du monde sinophone traitant du thème de la vieillesse et nous montrant toute la puissance éthique de la forme narrative attentive aux émotions et aux relations humaines. Marie Laureillard, maître de conférences HDR en études chinoises à l’université Lumière Lyon 2 et membre de l’Institut d’Asie orientale (IAO) ainsi que des réseaux Langarts et CEEI, mène des recherches sur la littérature et l’art modernes du monde sinophone, et plus spécialement sur les représentations et les transferts culturels, ainsi que les croisements entre texte et image. Elle est l’auteur de Feng Zikai, un caricaturiste lyrique : dialogue du mot et du trait (L’Harmattan, 2017), Peintures et caricatures de Feng Zikai (You Feng, 2020) et Shanghai en 1930 : caricatures, arts et lettres dans les revues « Shanghai Sketch » et « Modern Sketch » (Hémisphères, 2021). Elle a codirigé Fantômes dans l’Extrême-Orient d’hier et d’aujourd’hui (Presses de l’Inalco, 2017) et À la croisée de collections d’art entre Asie et Occident (Hémisphères, 2019). Par ailleurs, elle est directrice de collection aux éditions Circé et traductrice littéraire : elle cotraduit actuellement Libération de Hwang Chun-ming pour Circé. Par ailleurs, elle codirige un projet de publication avec Guo Weiwei et Isabelle Guinamard (université Lyon 2) sur la vieillesse en Chine et en France vue à travers le langage, la littérature et les arts visuels. - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - Choc émotionnel, sentiments altruistes et intérêt humain. Valorisation du care dans les reportages de Chai Jing #Mots-clés : Care, Intérêt humain, Empathie, Chai Jing, Insight, Journalisme d’investigation Reportrice d'investigation pour CCTV (Télévision Centrale de Chine) de 2001 à 2013, Chai Jing (柴静) n'a jamais cessé de démontrer son intérêt pour les petites gens, son souci de dévoiler l'histoire derrière l'histoire et son engagement à lutter contre l'hypocrisie du mécanisme social. Ses diverses productions, de l'épidémie du SRAS à l'affaire Yao Jiaxin, en passant par les « deux sessions » de 2006, Séisme de 2008 au Sichuan et les Jeux Olympiques d'été de 2008, en témoignent. Grâce à sa sensibilité instinctive et son regard perçant, il est fréquent que la journaliste donne à voir non seulement la vérité de tel individu ou de telle affaire, mais encore, et surtout, qu'elle aide le spectateur à mieux appréhender le souvenir collectif du pays qui fabrique la nouvelle histoire de la Chine au XXIe siècle. Dans cette communication et dans l'optique de cette journée portant sur AsieS « en care », je souhaiterais éclairer, à travers les articles autobiographiques rassemblés dans Insight(看见), des poétiques du care qu'invente Chai Jing au fil de sa carrière d'animatrice-reportrice, ainsi que les pratiques qui la caractérisent et les polémiques qu'elle suscite. Je me demande ainsi d'abord, dans quelle mesure les reportages d'investigation de Chai Jing héritent de la tradition des « Frondeuses » qui réaniment la « human interest story » par leur capacité à l'empathie et leur fusion volontaire avec le sujet observé. Dans un deuxième temps, je pourrais analyser la posture de « porte-parole des invisibles » que Chai Jing a endossée pour intervenir dans l'espace médiatique et ses répercussions sur la réception de ses reportages chez le grand public chinois. Enfin, je me pencherais plus spécifiquement sur les articles lyriques qu'elle a écrits au moment des grandes crises (épidémie et séisme), pour comprendre de quelle manière le journalisme du care peut apaiser la souffrance collective, créer les liens de solidarité et conduire à une démocratie plus bienveillante. Il s'agirait par exemple de montrer que cela n'est pas sans résonnance avec l'épouvante situation que la pandémie de COVID-19 nous a imposée ainsi que la détresse et la vulnérabilité que nous partageons tous pendant cette période exceptionnelle. Qing Feng est doctorante en Littératures Françaises et Comparées à l’Université Paul Valéry Montpellier 3. Elle est rattachée à l’équipe de recherche EA 4209 - RIRRA 21 et travaille sous la direction de Marie-Ève Thérenty et la codirection de Hong Huang. Financée par le China Scholarship Council, sa thèse en cours de rédaction s’intitule « Marguerite Duras Journaliste ». Elle s’intéresse à différentes questions concernant Marguerite Duras et la presse (ses poétiques journalistiques, ses postures médiatiques, les liens entre ses articles journalistiques et sa production littéraire) ainsi que divers autres sujets (les femmes journalistes, les hebdomadaires culturels et politiques des années 1950, la poétique du support, le journalisme narratif…). D’origine chinoise, elle travaille également sur quelques sujets-passerelles entre Chine et France (la traduction et la réception de Marguerite Duras en Chine, l’influence durassienne chez les femmes écrivains contemporaines chinoises, la représentation de la Chine dans la presse française du XXe siècle). - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - "Partager" les malheurs en Corée du Sud #Mots-clés : malheur, empathie, inégalités sociales, cancer du sein, accident de travail, naufrage de Sewol, Corée du Sud « Tongbyŏngsangnyŏn (同病相憐) » est l'expression idiomatique courante dans la langue coréenne qui fait référence à l'empathie entre des personnes en souffrance. Sa traduction courante en français est « ceux qui connaissent les mêmes malheurs sympathisent entre eux ». Cette expression vient à l'origine d'un ancien ouvrage à la fois fictionnel et historique de la Chine, intitulé Owŏlch'unchu (吳越春秋). Nous souhaitons soumettre à la discussion de cet atelier les événements pour lesquels des Sud-coréen·ne·s évoquent cette expression. Cette présentation vise à ouvrir la discussion sur le lien entre cette rhétorique de l'empathie et des expressions émotives (e.g. solidarité, indignation), qui peuvent s'y associer et qui contribue à la formation d’un acte collectif en faveur de la justice. Il s'agit de découvrir comment, et vers quoi l'empathie envers les personnes en souffrance évoluent ou s'associent à d'autres affects, voire des actes dans deux narrations des patientes atteintes d'un cancer du sein, tirées de ma thèse en sociologie, deux écrits publiés en commémoration des victimes du naufrage de Sewol, ainsi que deux paroles autour des accidentés du travail. Les trois contextes, que nous considérons comme révélateurs des inégalités sociales en Corée du Sud, pourrons nous éclairer en quoi le sentiment partageant les mêmes malheurs mérite une relecture tout en interrogeant le travail qu'il effectue dans le monde social. Miwon Seo-Plu, doctoresse en sociologie, travaille sur des objets qui réunissent la santé, la subjectivité et le vécu. L'ensemble de ses recherches a mis en lumière ce en quoi consiste le vécu des individus (malades et leurs proches) en Corée du Sud, dans un pays qui est dominé par la croissance technologique de la biomédecine et qui se veut comme modèle en matière de biosécurité. Elle interroge le rapport que l'individu noue avec les institutions et tous les acteurs qui peuvent potentiellement prendre en main le pouvoir de gouverner leur corps. - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - Fabrique d'un luxe écoresponsable ? Regards et réalisations croisées, entre artistes et maisons de luxe #Mots-clés : art, luxe, co-création, hybridation, modes de production, développement durable, écoresponsabilité L'industrie du luxe, qu'on a pu imaginer comme retranchée dans une tour d'ivoire, comme continent à part évoluant sur une autre planète, semble bien loin de l'idée de « care ». Pourtant, de jeunes marques de luxe affichant un positionnement volontaire vis à vis d'une conscience et d'un respect social, sociétal ou environnemental, s'imposent comme de nouveaux entrants face aux marques de luxe historiques. Un pan de la sociologie (Abélès, Lochard, Murat) a posé que le luxe avait un rôle à jouer dans une redéfinition des valeurs nécessaire à la promotion du développement durable. Et si les valeurs du luxe d'hier revisitées grâce au développement durable, étaient celles du luxe de demain ? Cette présentation portera sur les images émises par l'entreprise du luxe pour communiquer sur la qualité écoresponsable et durable de ses pratiques, dans ce que l'on pourra appeler un « imaginaire du care ». Je réfléchirai à la manière dont l'art et l'esthétique peuvent participer à l'élaboration de stratégie de communications sensibilisant les collaborateurs et les clients au respect environnemental et sociétal valorisé par la maison de luxe. Qu'elles prennent la forme d'objets, de visuels ou d'événement, ces co-créations sont comprises comme le fruit de modes de production hybrides, dans lesquels marque de luxe et identité de l'artiste se mêlent. Se superposent ainsi des questions d'ordre social, esthétique, politique et économique, propres à l'action économiques et à l'expression artistique, que je travaillerai à déchiffrer. En contextualisant l'œuvre de chaque artiste (histoire, publics, influences etc.) et de chaque entreprise (activité, ressources, structure etc.), j'aborderai la notion du « care » dans une approche plurielle, et tenterai de mettre en lumière les intérêts et les stratégies spécifiques à chaque collaboration. Je questionnerai la façon dont ces rencontres ponctuelles entre art et industrie émettent des images qui tentent de répondre aux attentes des jeunes consommateurs quant au « maint[ien], [d'une] perpétu[ation], [d'une] répar[ation] de notre « monde », de sorte que nous puissions y vivre aussi bien que possible» (Joan Tronto, 1993) Fanny Paldacci est docteure en Arts de l’Académie des Arts de Chine. Elle a consacré sa thèse de doctorat d’état chinois à l’étude des dispositifs de résidence artistique en entreprise, en Chine, et réalise actuellement un second travail de thèse à l’Université Jean Moulin - Lyon III, sous la direction de Gregory B. Lee. Membre de l’Institut d’Études Transtextuelles et Transculturelles, elle enseigne les langues et la culture dans le département d’Études Chinoises de l’Université Jean Moulin. Elle mène des recherches sur l’histoire de l’art moderne et contemporaine de la Chine, ainsi que sur les manières dont l’esthétique accompagne le développement économique, en Chine. |
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